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Le projet Meth’Algues

METH’ALGUES – Des algues pour réduire le méthane émis par les vaches laitières

Pour répondre aux enjeux du changement climatique, l’agriculture doit baisser ses émissions de gaz à effet de serre et fait donc face à de nombreux défis. Parmi ceux-ci, la production de méthane (CH4) entérique par les ruminants est particulièrement importante. En effet, ce gaz émis dans le système digestif des ruminants présente un fort potentiel de réchauffement.

Différents leviers peuvent être utilisés pour réduire les émissions de CH4 entérique chez les ruminants. Ils concernent la génétique, la conduite du troupeau, la composition du régime alimentaire et/ou l’ajout d’additifs dans la ration. Différents additifs ont ainsi été étudiés, dont les algues qui ont montré un intérêt dans ce cadre.

Cependant, les algues (Asparagopsis sp.) qui ont montré la plus forte réduction des émissions de méthane par les ruminants sont peu/pas présentes sur les côtes françaises. Leur culture doit encore être améliorée pour permettre des productions à grande échelle, et n’est pas toujours autorisée en mer. En revanche, la molécule contenue dans ces algues qui permet la réduction du méthane entérique (le bromoforme) peut être retrouvée dans d’autres algues endémiques de France.

Par ailleurs, les algues françaises contiennent également d’autres molécules (dont les polyphénols, ou certains polysaccharides) qui ont des actions antimicrobiennes. Elles pourraient donc également entrainer une diminution de la production de CH4 entérique par la flore microbienne contenue dans le rumen des ruminants.

Le projet Meth’algues visait donc à explorer l’utilisation d’algues endémiques des côtes françaises comme additifs dans la ration des bovins afin de réduire la production de CH4 entérique.

 

Le projet

Le projet Meth’algues est un projet de 3 ans qui a débuté en janvier 2021.

Ce projet répond aux besoins d’amélioration des connaissances scientifiques et pratiques sur cette solution d’avenir qu’est l’utilisation d’algues marines pour réduire les émissions de méthane entérique des bovins.

Le projet Meth’algues a fonctionné comme un entonnoir. En partant d’une analyse large de la littérature scientifique traitant de l’effet des algues dans la réduction du méthane entérique, les algues ont été au fur et à mesure sélectionnées in vitro puis in vivo afin de sélectionner les meilleures candidates possibles. Une projection à l’échelle territoriale de la Bretagne et des Pays de la Loire a aussi été réalisée à la fin du projet.

Le projet s’articulait ainsi autour de 5 objectifs:

  • Evaluer les ressources locales & mondiales en algues et repérer les espèces présentant un intérêt pour réduire les émissions de méthane entérique chez la vache laitière.
  • Tester un panel d’algues identifiées comme d’intérêt dans des essais in vitro mesurant leur potentiel méthanogène.
  • Tester les trois solutions les plus efficaces pour réduire les émissions de méthane entérique dans un essai in vivo en conditions contrôlées.
  • Tester la solution la plus efficace pour réduire le méthane en conditions d’élevage avec un contrôle individuel des performances, notamment l’ingestion.
  • Simuler les conséquences de l’utilisation d’un additif à base d’algues pour réduire l’impact environnemental de la production laitière à l’échelle du territoire des régions Bretagne et Pays de La Loire.

 

Le rôle du CEVA

Le CEVA a eu en charge le premier lot du projet correspondant au screening des algues (macroalgues et microalgues) présentant un intérêt pour réduire les émissions de méthane entérique chez la vache laitière, notamment par leur teneur en bromoforme et polyphénols.

Le CEVA a également été en charge de la recherche des matières premières algales utilisées dans les différents essais (in vitro et in vivo) ainsi que de leurs analyses, notamment celles des molécules d’intérêt. Enfin, le CEVA a apporté son expertise au consortium dans le cadre des échanges et réunions permettant de piloter et orienter le projet, ainsi que pour la rédaction d’articles ou la préparation de présentations lors de congrès.

 

La sélection des algues candidates

Le premier travail réalisé dans le cadre de ce projet a donc consisté en une analyse de la littérature scientifique afin d’identifier les molécules impliquées dans la perturbation de la production de méthane entérique par les ruminants et les espèces d’algues qui en contenaient des teneurs importantes.

Une première sélection a ainsi pu être réalisée, que vous trouverez également dans la fiche pratique dédiée :

Sélection d’espèces d’intérêt disponibles sur les territoires de la Bretagne et des Pays-de-Loire

 

Une première campagne de tests in vitro

A l’issue de cette première phase de sélection, une étude in vitro a été menée avec le laboratoire de Nutrition Animale du Centre Mondial de l’Innovation Roullier afin de tester l’effet de ces algues sur la réduction de méthane ainsi que leur impact sur la digestion ruminale (production d’acide gras volatiles). Les principaux résultats ont été présentés lors des 26e Rencontres autour des Recherches sur les Ruminants (2022).

Les résultats sont aussi repris dans une fiche pratique  et résumés dans ce court film :

 

Tests d’efficacité avec des vaches laitières

L’étude in vitro a permis de sélectionner les espèces à utiliser lors des tests d’efficacité menés avec des vaches laitières dont l’alimentation a été légèrement modifiée pour intégrer ces algues.

Les algues Chondrus Crispus, Fucus vesiculosus et un additif de l’entreprise Rouiller ont été testés en conditions contrôlées. La mesure du méthane entérique produit par les vaches laitières a été réalisée au GreenFeed, un dispositif non intrusif qui permet de mesurer directement le méthane éructé par les vaches.

 

 

Les algues incorporées aux aliments des vaches laitières n’ont pas montré d’effets négatifs sur l’ingestion de l’aliment, ni sur la production laitière. En revanche, aucune réduction de méthane a été observée. un descriptif plus détaillé de ces résultats est disponible dans la fiche pratique associée.

Quantité de matière sèche ingérée (QI, en kgMS/vache/j) et émissions de méthane entérique (CH4, en g/vache/j) moyens (± erreur standard) pour les traitements avec additifs à base d’algues (Chondrus, Fucus, Roullier) ou sans (Témoin)

 

Un deuxième et dernier essai in vivo avec des vaches laitières a ensuite été réalisé à la station expérimentale des Trinottières afin de tester des quantités d’algues plus importantes. Un unique mélange d’algues (60% Chondrus crispus, 40% Fucus vesiculosus) a été utilisé afin de combiner les effets des molécules contenues dans ces deux algues (bromoforme et polyphénols). Les mesures de méthane ont de nouveau été réalisées au GreenFeed.

Synthèse des résultats d’expérimentation de l’essai réalisé à la ferme des Trinottières

Les résultats ont été similaires au précédent essai in vivo avec une absence d’effet sur l’ingestion et la production mais également sur la production de méthane. Une fiche pratique reprend les principaux résultats de cet essai.

Conclusions

Il semble donc que les algues testées dans le cadre du projet Méth’algues ne soient pas des bonnes candidates pour la réduction du méthane produit par les vaches laitières. Les teneurs en composés d’intérêt (bromoforme ou polyphénols) parfois faibles, ainsi que leur variabilité dépendant de l’environnement (différence de composition entre les lots testés in vitro et in vivo), semblent être les facteurs explicatifs les plus probables.

Un dernier aspect à prendre en compte est la disponibilité des algues qui, en France, reposent essentiellement sur la récolte. En se basant sur la moyenne des volumes récoltées entre 2019 et 2021 pour Chondrus et Fucus, il a été estimé que les volumes récoltés permettraient de nourrir 37 troupeaux de 100 vaches à raison d’un taux d’incorporation de 1% dans la ration. Même si des volumes supplémentaires restent encore disponibles pour l’espèce Fucus, ils ne sont pas suffisants pour envisager une utilisation à l’échelle du territoire dans l’alimentation animale s’ils restent basés sur de la récolte d’algues sauvages.

Une présentation de l’ensemble du projet  a été réalisée lors du Space 2023 (diaporama disponible ici).

 

Partenaires scienntifiques et techniques du projet

Partenaires financiers

 

 

 

 

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